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Histoire des deux Restaurations
:
jusqu'à l'avènement
de Louis-Philippe,
de janvier 1813 à octobre 1830.
Tome troisième
par Ach. de Vaulabelle
avec l'aide de
extraits
p.176-177
... Plus son (Napoléon 1er) malheur semblait irréparable
à lui-même et aux autres, plus on mettait de soin à
s'éloigner de lui. Ministres, généraux, pairs,
députés, courtisans, les personnages mêmes qui tenaient
le plus près à sa personne, le délaissaient ; il
ne voyait auprès de lui que le petit nombre d'amis et de serviteurs
décidés à partager son exil, quel qu'il fût,
dans quelque lieu qu'il le portât ; et, si l'on excepte M. Fleury
de Chaboulon, les généraux de Flahaut et Bernard, qui
ne le quittèrent qu'au moment de son départ pour Rochefort,
on ne cite guère, comme les visiteurs pieux de la Malmaison,
que MM. de Bassano, Lavalette, la duchesse de Vicence, les comtesses
Regnault (de Saint-Jean-d'Angély), Caffarelli et Walewska. La
journée du 27 vit cependant arriver à la Malmaison les
généraux Chartran et Piré...
p.191-192
On sait que M. de Flahaut avait été envoyé par
l'Empereur à Paris, peu d'instants après le départ
de Decrès et de M. Boulay (de la Meurthe) ; il était chargé
pour Davoust d'une demande dont nous ignorons l'objet. Le prince d'Eckmühl,
lorsque l'envoyé de Napoléon vint le chercher au ministère
de la guerre, se trouvait aux Tuileries. M. de Flahaut alla l'y joindre
et lui dit l'objet de sa mission. Davoust l'écouta à peine.
"Il paraît, dit-il au général d'un ton de colère
et de mépris, que votre Bonaparte ne veut point partir ; mais
il faudra bien qu'il nous débarrasse de lui : sa présence
ici nous gêne, nous importune, elle nuit au succès de nos
négociations. S'il espère que nous le reprendrons, il
se trompe ; nous ne voulons plus de lui. Dites-lui, de ma part, qu'il
faut qu'il s'en aille ; et que, s'il ne part pas à l'instant,
je le ferai arrêter, que je l'arrêterai moi-même."
M. de Flahaut n'était pas dans le secret des récents engagements
du prince d'Eckmühl ; il sembla d'abord douter en entendant ce
langage ; sa surprise devint ensuite de la stupéfaction. Aux
derniers mots, pourtant, ce général, caractère
fier et âme haute, s'indigna : "Je n'aurais jamais pu croire,
monsieur le maréchal, répondit-il en s'efforçant
de maîtriser son émotion, qu'un homme qui était,
il y a huit jours, aux pieds de Napoléon, pût tenir aujourd'hui
un pareil langage. Je me respecte trop, je respecte trop la personne
et l'infortune de l'Empereur, pour lui rapporter vos paroles : allez-y
vous-même, monsieur le maréchal ; cela vous convient mieux
qu'à moi." Le prince d'Eckmühl, irrité, rappela
au général qu'il parlait au ministre de la guerre, au
chef de l'armée, et lui prescrivit de se rendre à Fontainebleau,
où il recevrait ses ordres. "Non, monsieur, répondit
le comte de Flahaut, je n'irai point ; je n'abandonnerai point l'Empereur
; je lui garderai jusqu'au dernier moment la fidélité
que tant d'autres lui ont jurée. - Je vous ferai punir de votre
désobéissance. - Vous n'en avez plus le droit. Dès
ce moment je donne ma démission. je ne pourrais plus servir sous
vos ordres sans déshonorer mes épaulettes." Il sortit.
L'Empereur, au retour du général Flahaut à la Malmaison,
s'aperçut qu'il avait l'âme blessée ; il le pressa
de questions et parvint à tirer de lui l'aveu de ce qui s'était
passé. Napoléon ne témoigna ni étonnement
ni colère des insultes de son ancien ministre : "Qu'il vienne,
répondit-il froidement ; je suis prêt, s'il le veut, à
lui tendre la gorge. Votre conduite me touche, mon cher Flahaut, ajouta-t-il
; mais la patrie a besoin d'hommes tels que vous : restez à l'armée,
et, comme moi, oubliez le prince d'Eckmühl et ses lâches
menaces." (Mémoires de M. de Chaboulon.)
Lorsque, le 29, le maréchal Davoust menaçait de faire
arrêter l'empereur, de l'arrêter de sa propre main, s'il
ne partait pas sur-le-champ, ce jour-là même, au quartier
général de Wellington, comme nous aurons à le dire
plus loin, cinq commissaires français, membres de la Chambre
des représentants et de la Chambre des pairs, proposaient, de
leur côté, de livrer Napoléon aux généraux
alliés...
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