Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
26 février 1806 , Paris
Ne sois pas inquiet de ma santé, mon cher Eugène, je me porte beaucoup mieux ; j'étais encore malade de n'avoir pas été à Munich quand maman t'a écrit, mais la distraction et l'exercice du cheval m'ont fait beaucoup de bien ; cependant, comme c'est toujours le chagrin qui me fait du mal, je tremble de ne pas être bien dans quelque temps.
Croirais-tu que l'on veut nous envoyer en Hollande ? Sans bonheur intérieur et sans ambition, qu'est-ce que je deviendrai ? Je ne puis pas y penser sans que les larmes me viennent aux yeux. Il y a tant de personnes qui seraient contentes d'être reine !... Pourquoi ne pas leur donner ce bonheur-là qui me rendrait, moi, si malheureuse ! J'espère encore, mais l'Empereur paraît y tenir et sa politique passe avant tout. Mon Dieu, je crois que j'en mourrai de chagrin !
Maman était hier chez l'Empereur quand il a reçu une lettre de toi et une de Junot. Tu lui disais ce que tu avais fait et Junot lui demandait conseil sur tout ce qu'il voulait faire. Il a fort bien remarqué la différence et tu as dû recevoir une lettre un peu sèche de sa part. On croit bien faire et on se trompe souvent. Pourvu qu'il juge l'intention, c'est tout ce que nous pouvons désirer.
Adieu, mon bon Eugène, tu seras toujours ma plus douce consolation dans tous mes chagrins ; ainsi pense à moi et aime-moi toujours bien.
Hortense
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