Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
30 juillet 1806, Mayence
Je commençais à être bien triste, mon cher Eugène, de ne pas recevoir de tes nouvelles. Maman, qui est toujours paresseuse, ne m'avait pas écrit depuis mon départ et j'ai tant besoin de croire que l'on pense à moi que je commençais à m'affecter. Heureusement, hier, j'ai reçu une lettre de maman et deux de toi. Quel bonheur si nous pouvons être tous réunis dans un mois ! J'espère que la grossesse de ma belle-soeur ne l'empêchera pas de faire le voyage. Je suis persuadée que nous nous aimerons beaucoup ; puisqu'elle fait ton bonheur, tu ne peux pas douter de tous les sentiments qu'elle m'inspire déjà.
Nous sommes depuis dix jours à Mayence et nous allons tous les matins prendre les eaux à Wiesbaden ; elles sont un peu fortes et ma fatiguent beaucoup ; mais on dit que c'est l'effet habituel et que c'est un bien.
J'ai Napoléon avec moi ; tu ne le reconnaîtrais pas ; si tu savais comme il est gentil ! C'est déjà un homme ; il ne me quitte jamais, me tient compagnie ; je pense avec chagrin que, quand il aura sept ans, il faudra m'en séparer ; car tu sais que, d'après l'arrêté de l'Empereur, nos enfants doivent être élevés à Meudon ; mais avant sept ans on nous les laisse. Je crois que, quand ce temps arrivera, j'irai aussi me mettre en pension avec eux. Mon petit Louis est resté à La Haye ; il se porte aussi fort bien et devient bien gentil.
Adieu, mon cher Eugène, mon meilleur ami, je t'aime et t'embrasse de tout mon coeur.
Hortense
Ecrit de la main de l'enfant :
J'embrasse Nonnonque
et Tata Eugène
Napoléon
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