Lettre d'Hortense de Beauharnais à son frère Eugène
9 décembre 1808, Paris
Nous attendons tous les jours la nouvelle de l'accouchement de ma soeur. Tu penses que c'est avec bien de l'impatience. Elle a une si bonne santé, et puis elle est heureuse. Voilà bien des raisons qui doivent nous rassurer et faire penser que tout se passera bien.
Je ne t'ai pas écrit depuis bien longtemps, mais j'ai été bien souffrante. On dit que c'est une crise heureuse, et que cela arrêtera le dépérissement que j'éprouvais depuis quelques temps. Corvisart trouve même que c'est la première fois, depuis le malheur que j'ai éprouvé, qu'il trouve mon pouls naturel. Dieu veuille que ma santé se rétablisse, car j'en ai bien besoin ! Cela donne le courage de supporter bien des choses et on finit par être à charge à tout le monde quand on est toujours souffrante. Je suis si maigrie que tu ne me reconnaîtrais pas ; mais on me donne l'espérance de reprendre un peu, et cependant je crois qu'il faut la saison des eaux pour me rétablir tout à fait. Si j'avais pu faire un petit voyage en Italie, je ne doute pas que de te voir ne m'eût fait un grand bien, mais il faudra bien que cela arrive un jour.
Nous menons une vie bien triste à présent : voici plusieurs jours qu'on n'a reçu de tes nouvelles et, malgré soi, on est inquiet. Il me tarde bien de voir l'Empereur sortir de là-bas : j'espère qu'il n'ira pas plus loin que Madrid, car cela désolerait tout le monde, et cela serait vraiment imprudent.
Je reçois souvent des nouvelles de la reine de Naples ; elle a été bien contente de toi à son passage à Milan.
Adieu, je t'aime et t'embrasse. Mille choses à ma soeur ; on parle déjà dans le monde de la beauté de Mlle Joséphine.
Hortense
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