année 1850
22 août 1850
Voyage de Strasbourg
M. le Président de la République se rend à Strasbourg le 22 août. Le même jour, le Prince assiste à un banquet offert par le commerce et l'industrie, et répond en ces termes au toast porté par M. le Président de la chambre de commerce :
Messieurs,
Recevez mes remercîments pour la franche cordialité avec laquelle vous m'accueillez parmi vous. La meilleure manière de me fêter, c'est de me promettre, comme vous venez de le faire, votre appui dans la lutte engagée entre les utopies et les réformes utiles.
Avant mon départ, on voulait me détourner d'un voyage en Alsace. On me répétait : Vous y serez mal venu. Cette contrée, pervertie par des émissaires étrangers, ne connaît plus ces nobles mots d'honneur et de patrie que votre nom rappelle, et qui ont fait vibrer le coeur de ses habitants pendant quarante années. Esclaves, sans s'en douter, d'hommes qui abusent de leur crédulité, les Alsaciens se refuseront à voir, dans l'élu de la nation, le représentant légitime de tous les droits et de tous les intérêts !
Et moi je me suis dit : Je dois aller partout où il y a des illusions dangereuses à dissiper et de bons citoyens à raffermir. On calomnie la vieille Alsace, cette terre de souvenirs glorieux et des sentiments patriotiques
; j'y trouverai, j'en suis assuré, des coeurs qui comprendront ma mission et mon dévouement au pays.
Quelques mois, en effet, ne font pas d'un peuple profondément imbu des vertus solides du soldat et du laboureur un peuple ennemi de la religion, de l'ordre et de la propriété.
D'ailleurs, Messieurs, pourquoi aurais-je été mal reçu ?
En quoi aurais-je démérité de votre confiance ?
Placé par le vote presque unanime de la France à la tête d'un pouvoir légalement restreint, mais immense par l'influence morale de son origine, ai-je été séduit par la pensée, par les conseils d'attaquer une Constitution faite pourtant, personne ne l'ignore, en grande partie contre moi ?
Non ; j'ai respecté et je respecterai la souveraineté du peuple, même dans ce que son expression peut avoir de fausse ou d'hostile.
Si j'en ai agi ainsi, c'est que le titre que j'ambitionne le plus est celui d'honnête homme.
Je ne connais rien au-dessus du devoir.
Je suis donc heureux, Strasbourgeois, de penser qu'il y a communauté de sentiments entre vous et moi. Comme moi vous voulez notre patrie grande, forte, respectée ; comme vous, je veux l'Alsace reprenant son rang, redevenant ce qu'elle a été durant tant d'années, l'une des provinces les plus renommées, choisissant les citoyens les plus dignes pour la représenter, et ayant, pour l'illustrer, les guerriers les plus vaillants.
"A l'Alsace ! à la ville de Strasbourg !"
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