année 1851
6 juillet 1851
Inauguration de la statue de Jeanne Hachette à Beauvais
Le Président de la République se rend à Beauvais pour assister à l'inauguration de la statue de Jeanne Hachette.
Le Prince prononce l'allocution suivante :
Messieurs,
L'honorable maire de Beauvais me pardonnera de me borner à un simple remercîment pour les paroles flatteuses qu'il vient de m'adresser. En y répondant, je craindrais d'altérer le caractère religieux de cette fête, qui, par la commémoration d'un fait glorieux accompli dans cette ville, offre un haut enseignement historique.
Il est encourageant de penser que, dans les dangers extrêmes, la Providence réserve souvent à un seul d'être l'instrument du salut de tous ; et, dans certaines circonstances, elle l'a même choisi au milieu du sexe le plus faible, comme si elle voulait, par la fragilité de l'enveloppe, prouver mieux encore l'empire de l'âme sur les choses humaines, et faire voir qu'une cause ne périt pas lorsqu'elle a pour la conduire une foi ardente, un dévouement inspiré, une conviction profonde.
Ainsi, au XVè siècle, à peu d'années d'intervalle, deux femmes obscures, Jeanne d'Arc et Jeanne Hachette, apparaissent au moment le plus désespéré pour remplir une sainte mission.
L'une a la gloire miraculeuse de délivrer la France du joug étranger ;
L'autre inflige la honte d'une retraite à un prince qui, malgré l'éclat et l'étendue de sa puissance, n'était qu'un rebelle, artisan de guerre civile.
Et cependant, à quoi se réduit leur action? Elles ne firent autre chose que de montrer aux Français le chemin de l'honneur et du devoir, et d'y marcher à leur tête.
De semblables exemples doivent être honorés, perpétués. Aussi suis-je heureux de penser que ce soit l'Empereur Napoléon qui, en 1806, ait rétabli l'antique usage, longtemps interrompu, de célébrer la levée du siège de Beauvais.
C'est que, pour lui, la France n'était pas un pays factice, né d'hier, renfermé dans les limites étroites d'une seule époque ou d'un seul parti : c'était la nation grande par huit cents ans de monarchie, non moins grande après dix années de révolution ; travaillant à la fusion de tous les intérêts anciens et nouveaux, et adoptant toutes les gloires, sans acception de temps ou de cause.
Nous avons tous hérité de ces sentiments, car je vois ici des représentants de tous les partis ; ils viennent avec moi rendre hommage à la vertu guerrière d'une époque, à l'héroïsme d'une femme.
Portons un toast à la mémoire de Jeanna Hachette.
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