Lettres d'Adélaïde de Souza à Charles de Flahaut, son fils
(CHAN 565 AP 9)
12 décembre 1816

Après y avoir bien regardé de considéré, j'ai trouvé qu'une lettre où tu disais de me demander des détails, fort innocents assurément mais que tu ne donnais pas et qu'on pouvait supposer à sa fantaisie était fort inutile à laisser traîner sur une table, et je l'ai jetée au feu. Je traite très bien Casimir, j'ai beaucoup de goût pour son esprit, j'estime sa fidélité en amitié mais le tour (qui a eu des suites si cruelle pour elle) qu'il a fait à Henriette, tour que je ne dirai jamais à elle parce que tu le lui avais recommandé me donne une grande méfiance de lui et de sa faiblesse pour Bego ; enfin ne me parle jamais de mon ancien ami de Suisse qu'en le nommant par son nom de Corbier ; tu ne sais pas comme nous vivons, c'est à ne pouvoir l'imaginer.
J'ai fait tes plus tendres compliments à Casimir en lui disant que tu ne pouvais lui écrire, partant pour la campagne, mais que tu lui écrirais à ton retour, et que tu lui demandais tes romances. Il a été suffisamment satisfait de ton souvenir , ainsi il a eu de ta lettre tout ce qui n'était pas dangereux à lui laisser. Du reste, en jetant au feu ton petit billet que je me suis sentie heureuse d'une confiance, d'une amitié si parfaite entre nous, que nous puissions disposer comme cela l'un de l'autre : Ah ! c'est bien pour nous qu'est l'amitié dont parle Montaigne : c'est que c'est lui, c'est que c'est moi.
L'aîné Delope (?) est venu me voir hier ; il paraît t'aimer beaucoup ; je t'enverrai par lui les romances si je puis les avoir, et sûrement les bretelles qu'il m'a demandées.
Nonore est ici, malheureuse à me donner une douleur de côté rien qu'en la regardant.
Lady Holland a-t-elle été contente de sa robe ? Dis-lui bien que l'ouvrier est une nouvelle étoile de mode que tout le monde emploie, et tu diras vrai, particulièrement les Anglaises. Par qui m'avais-tu renvoyé cet échantillon, je ne l'ai pas reçu ; en tout, je crois que beaucoup de lettres s'égarent à l'office à Londres ; ici c'est fort exact.
Il ne va de Français chez M. de Tall... que son ancienne société, pas un ami de la cour, le Roi l'a expressément défendu, mais tous les étrangers y vont ; même le corps diplomatique, ce qui est contre toutes les bienséances d'autrefois.
Mlle Jolie m'écrit un grand récit du danger qu'elle a couru sur mer où elle est restée trois jours.
Il n'y a point telle chose à Paris que la boîte de Mme de Bourke (?) désire, celle qu'on y a , à charnières de bois, y viennent d'Ecosse (?)
Le duc de Well... arrive ici le 25 avec son état-major. Ainsi je reverrai lord William Russell qui pourrait aller faire une colonie de Russell dans quelque nouveau monde, vu la quantité d'enfants que la duchesse ait pu avoir.
Adieu, je t'aime de toute mon âme.

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dernière modification : 26 décembre 2019
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