Lettres d'Adélaïde de Souza à Charles de Flahaut, son fils
(CHAN 565 AP 9)
25 janvier 1819
Pas de lettre de mon pays le dernier courrier, cela m'a attristé, j'imagine que Palmella est en course, mais avez-vous reçu le tableau, Gabriel et moi nous en sommes bien inquiets. Les nouvelles sont qu'Excelmanns est arrivé ici avant-hier ; il est maigre, mais du reste ni changé ni vieilli sous aucun rapport. Il a été le lendemain faire une visite au ministre de la Guerre et le hasard a voulu qu'il arrivât en même temps que le général Despinois et qu'on les annonçât ensemble. Leurs deux noms ainsi proclamés ont causé une rumeur ... qui a fait pousser les coudes aux voisins de chaque parti opposé. Du reste je crains bien que cet excellent homme ne soit revenu pour voir mourir sa femme qui est dans un état affreux. Il paraît que dans ce village perdu où elle a été, on l'a blessée en accouchant, et non seulement elle est bien mal, mais elle souffre de douleurs horribles . On espère qu'il va être réintégré suer les tableaux ... et qu'il touchera aussi tout son traitement de la Légion d'honneur, ce qui lui fera quatre années à la fois.
Mme de Ravignan qui est toujours dans la même exagération, est cependant une excellente mère et est parfaite pour sa fille et ses petits enfants, et Excelmanns ne dit pas un mot de politique, ne se permet pas une plainte sur le passé. Alors cela pourra aller.
Mes bons amis, je suis encore bien faible, je ne puis pas m'occuper un instant, mais cependant j'ai repris ma vie habituelle. Mon ouvrage que j'aimais tant, est abandonné.
M. de S... ne veut pas entendre parler de revoir paraître mon métier . Il se trompe, cela me distrayait sans me fatiguer, mais il a été si inquiet, si tourmenté, que je n'ose pas le contrarier. Mme de Bassano est ici et va chez toutes ses anciennes amies. Lord W. Russell m'a écrit une lettre bonne, charmante, sur ma maladie. En voilà une des phrases qui m'ont touchée aux larmes car je suis un peu faible .
"I saw M. de Funchall yesterday who told me that you had been seriously ill. This was the first that I had heard of illness my poor dear bonne mère ; how you suffer and no child to console and comfort you . But I was happy to hear at the same time that you were recovering."
Au mois de juin, au plus tard juillet, j'espère avoir mon Charles, ma chère fille, et mon petit enfant pour me rendre foi, bonheur et santé, que je serai heureuse, trop heureuse et si je l'aurais acheté par bien des peines, ce me sera un tel bonheur que je n'aurais ni l'envie ni le droit de rien reprocher aux hommes, ni me plaindre du ciel.
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