Lettres d'Adélaïde de Souza à Charles de Flahaut, son fils Nous sommes ici dans une agitation extrême pour cette proposition de M. Barthelemy ; elle a passé hier dans la Chambre des Pairs à une majorité de 83 contre 55. Lanjuinais a parlé si fortement contre qu'il s'est fait rappeler à l'ordre, il leur a dit textuellement : "Vous ne voulez que changer le ministère, hé bien vous parviendrez à avoir un ministère digne de 1815, avec tous les accompagnements et bientôt après vous aurez le Réveil du peuple". Cela, ils l'ont passé doux comme miel , en gens qui se croient (et qui disent tout haut) sûrs de la Garde royale et des Suisses, mais il a ajouté : Déjà l'on voit des cocardes vertes, il y en a dans les provinces, on en a vu à Paris. C'est pour cela qu'on l'a rappelé à l'ordre. Cependant, M. de Case est monté à la tribune et a dit : L'on m'a bien fait le rapport qu'une dizaine de brigands qui commettent toutes sortes de désordres sur les grands chemins portaient la cocarde verte, mais du reste la nation est tranquille. Il a répété cependant que la proposition de M. Barthelemy était la plus funeste qu'on pût présenter. Elle n'en a pas moins passée, mais d'après la charte, il faut dix jours avant qu'une proposition d'une Chambre soit prise en considération dans l'autre. Et dans cet espace de temps, vous verrez des pétitions arriver de toutes les parties de la France ; c'est déjà un mal incalculable que d'avoir sommé les ... citoyens à se réunir entre eux que de laisser avoir ... au peuple que la noblesse est son ennemie née. Les propos des cafés sont affreux contre eux. Enfin tout ceci ressemble à 1791 comme si l'on y était. Et j'ai bien pensé que de même les constitutionnels se croient obligés d'appeler à lui le peuple pour défendre la liberté comme ils ont fait alors. L'on dit tout haut que ceci est la St Barthelemi de la liberté, à côté de toutes choses est le Roi qui met de la lenteur et donne son poids à tout. Il y a 4 jours qu'il a dans sa poche une liste de cinquante nouveaux pairs qu'on devait introduire dans la Chambre, il l'examine, il l'examinera et pendant ce temps, la proposition passe et ils arriveront à la Chambre lorsqu'ils n'y seront plus nécessaires , du moins pour cette grande question, on devrait changer tous les préfets ultras, on n'en a ôté que 6 et trente sont à Paris menacés de perdre leur place, se réunissent entre eux, parlent dans leurs réunions des esprits inquiets et fort irrités de l'incertitude de leur sort qui les tourmente depuis deux mois, ils retourneront dans leurs départements feront en-dessous tout le mal qu'ils pourront au gouvernement actuel, et jamais on n'aura de repos. Qui a fait tout cela ? Deux hommes qui veulent à tout prix être ministres : M. de Talleyrand et M. Molé. Pozzo di Borgo s'est ... et a déclaré à M. de Case qu'il n'y avait plus que les ultras auxquels on peut se réunir. De là une querelle terrible et une séparation, brouillés à ne plus se revoir, nonobstant le lendemain, M de Case ayant reçu du monde, Pozzo y est arrivé. Le ministre causait avec M. de Vicence lorsqu'il est entré. Pozzo est venu droit à lui en disant : il faut oublier tout cela et lui tendant la main. Cases s'est retiré en répondant : Non monsieur, je n'ai pas de main à vous donner, je la donnerai à M. de Vicence mais à vous jamais. |